Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
25 septembre 2020 5 25 /09 /septembre /2020 05:06

   

Le voyage aller s’est fait en deux étapes, ce qui nous a permis une petite visite des villes de Bourges et de Tours. De Bourges, on connaissait déjà l’essentiel, en particulier la cathédrale Saint-Étienne avec ses magnifiques vitraux et le palais Jacques Cœur, perle gothique de l’architecture civile.

         
Bourges : maisons anciennes rue d’Auron et rues Pelvoysin-Cambournac

On en a profité pour nous balader dans le centre ville en remontant la rue d’Auron, rue commerçante s’il en est, qui relie l’ancien palais ducal (aujourd’hui Hôtel du Département) à l’Église Saint-Pierre, jusqu’à la rue Moyenne, qui est en fait la rue principale de Bourges avec une belle place autour de la statue de Louis XI.
À Bourges, il faut lever la tête pour admirer les nombreuses maisons à pans de bois du XVème siècle, « la maison des 3 flûtes » ainsi que la place Gordaine où se rejoignent les rues piétonnes.

           
Bourges : 10 rue Moyenne et Place Gordaine

Le lendemain, nouvelle étape à Tours cette fois pour le repas et la promenade digestive dans le centre ville autour de la place Jean Jaurès, les belles maisons à colombages de la place Plumereau, jusqu’à la cathédrale Saint-Gatien.
J’ai été impressionné par l’immense hôtel de ville de style Belle époque construit autour de 1900 et flanqué par le Palais de justice ainsi que la gare qui a des airs de l’ancienne gare d’Orsay, ce qui est assez logique puisqu’elles sont du même architecte.

       

       
Tours : Façade de la cathédrale Saint-Gatien et entrée de la gare
Nef de la cathédrale et façade de l'hôtel de ville

Dans l’après-midi, arrivée au Puy du fou où on s’installe à l'hôtel "La citadelle" et son décor médiéval. A lire le plan, la journée du lendemain va être rude. On décide d’assister aux attractions les plus proches de notre hôtel et…  on n’est pas déçus.

      
Entrée de la Citadelle

D’abord, Le signe du triomphe, spectacle sur les jeux de cirque où les auriges montés sur leur char font le tour effréné de l’arène, évitent les collisions avec élégance et font face avec maestria aux aléas de la course. Des prisonniers chrétiens, sont jetés dans ces jeux pour sauver leur vie, aidés par le jeune centurion Damien.

   
  
Les jeux du cirque

Avec Les Vikings, c’est un beau spectacle de combat reproduisant les invasions vikings dans la France carolingienne du IXème siècle, qui nous est offert.  Vers l'an mil, au cours d'un mariage, les vikings attaquent un village, surgissant des eaux avec leurs redoutables drakkars pour le piller.


 
Scène des Vikings avec drakkar et attaques

Le bal des oiseaux fantômes permet de suivre les danses des rapaces, genre de spectacle auquel j’avais déjà assisté, un ballet aérien de quelque 200 rapaces.
Aigles, faucons, vautours et milans... rapaces et échassiers effectuent de véritables danses dans le ciel, réunissant au final quelque 150 oiseaux qui volent ensemble.




Autre spectacle que j’ai trouvé fort divertissant et réussi, Les Chevaliers de la table ronde qui nous conte, au pied des remparts, avec bagarres, duels et cabrioles la légendaire aventure du roi Arthur, dont l'enchanteur Merlin met le courage à rude épreuve.


Le soir, dîner-spectacle au café de la Madelon, mise en scène sympa sur scénario loufoque.
             

Et ce n'est pas terminé. Ensuite, direction la cinéscénie, vaste espace lacustre avec bâtiments médiévaux en toile de fond, où on va en prendre plein les mirettes et les oreilles pendant deux heures. Le spectacle nocturne retrace l’histoire de la Vendée à travers la présentation de scènes de la vie quotidienne de paysans de l’époque médiévale à l’époque actuelle.

Les tableaux grandioses aussi bien dans leur dimension son et lumière que par le nombre d’acteurs et de figurants, se succèdent sans qu’on s’en lasse. Il fait un peu froid mais on a évité la pluie. Ouf !  



Le lendemain, on repart à l’assaut de nouvelles attractions, direction côté opposé à notre hôtel. D’abord Les mousquetaires de Richelieu dans un grand espace intérieur, le Grand Carrousel, où D’Artagnan et ses compères s’en donnent à cœur joie dans les combats et duels, les cascades équestres, punissant comme il se doit, tous les méchants qui veulent s’en prendre au Cardinal et au roi.

 

    

Puis nous passons assister au Dernier panache, un spectacle grandiose à la gloire de François-Athanase Charrette de La Contrie, un des chefs des chouans pendant la guerre de Vendée contre des armées de la Révolution, sur une immense scène qui tourne pour mieux en présenter les différents tableaux.

 

       

Le spectacle se place du point de vue des vendéens pour bâtir une fresque à la gloire de l'aventure chouanne. nous faisant revivre et les événements qui se sont déroulés et sa fin tragique. Il retrace le destin héroïque de celui qui fut d’abord un officier de marine avant de devenir un des héros de la guerre d’Amérique puis l'un des prestigieux chefs vendéens.

 

À midi, déjeuner campagnard avec une animation par un groupe de chanteurs.

   

La journée est entrecoupée de petits spectacles comme Le monde imaginaire de La Fontaine qui pourrait être améliorée, malgré une bonne introduction ou la visite en continu du Premier royaume, que j’ai trouvé sans intérêt.

 

 Le Premier royaume
  Les fables de La Fontaine

 

Une journée bien remplie qui nous conduit toujours en soirée à assister aux Noces de feu, un mariage romantique dans un univers fantastique où des ensembles surgissent soudain des profondeurs des eaux, de la Muse violoniste et du Pianiste virtuose qui célèbrent leurs noces dans un décor d’eau et de feu.
Un voyage poétique en musique au cœur du XIXème siècle, servi par de superbes décors émergeant des eaux et de magnifiques costumes électroluminescents.

 

 

Dernier jour moins chargé, ponctué par deux spectacles intéressants. Le matin, un spectaculaire Le Secret de la lance  qui met en scène au XVe siècle Marguerite, une jeune bergère qui utilise une lance aux pouvoirs magiques, offerte par Jeanne d’Arc elle-même, pour chasser les anglais du sol de France.
 

 

Une belles scénographie avec des chevaux caparaçonnés comme au Moyen Âge et des simulations impressionnantes.


Le secret de la lance

À midi, agréable repas émaillé de quelques incidents risibles dans le décor rétro d’un village Belle époque, Le Bourg 1900, où nous assistons aussi au spectacle des automates musiciens qui interprètent des airs de l’époque.

 

     
     
Vue du Bourg 1900, les automates musiciens, le restaurant où nous sommes allés


On en profite pour assister à d’autres représentations comme Le Grand Carillon, immense machinerie où des musiciens acrobates jouent de célèbres airs de musique traditionnelle ou des circuits à thème, Le Mystère de La Pérouse où l’on déambule dans le vaisseau de La Pérouse qui lève les voiles à Brest en 1785 pour aller affronter des mers inconnues et dangereuses et Les Amoureux de Verdun où on sinue dans les galeries d'une tranchée de Verdun en décembre 1916, à travers la correspondance entre un soldat et sa fiancée, dont l’intérêt m’a paru assez limité.

         
Le Grand carillon                             Le mystère de La Pérouse
 

Dernier spectacle avec des acteurs jouant des personnages historiques, La Renaissance du château qui nous permet de découvrir l’intérieur du château du Puy du Fou ainsi que l'histoire de sa famille et de plonger dans l’atmosphère du XVIème siècle. Tout au long de la visite, quinze personnages animent les salles restaurées en reprenant l’apparat de chaque époque en nous faisant visiter l’ensemble des souterrains aux plafonds à caissons.

 

    
François 1er danse avec sa femme Éléonore       La révérence au roi

------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • le Puy du Fou © CJB  ° • 21/09/ 2020  >>
------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
25 septembre 2020 5 25 /09 /septembre /2020 05:01

Turner, peintures et aquarelles au Musée au musée Jacquemart-André 2020

Cette exposition a été organisée en collaboration avec la Tate Britain.

 

       
                                           Venise, vue sur la lagune au coucher du soleil, 1840  

 

Une belle rétrospective de William Turner (1775-1851) au musée Jacquemart-André. Celui qui est considéré comme le plus prestigieux des représentants de l’âge d’or de l’aquarelle anglaise, a su mieux que quiconque rendre les infinies possibilités de la lumière, sa transparence sur les paysages qu’il affectionnait.

 

           
Autoportrait vers 1800                  Turner dans son atelier vers 1820

On peut suivre son évolution, tout au long de cette exposition, de ses œuvres de jeunesse aux tableaux lumineux et colorés de sa maturité qui participent grandement à sa notoriété actuelle. C’est quelque 60 aquarelles et une dizaine de peintures à l’huile, dont certaines inédites en France, que nous propose le musée Jacquemart-André avec l’aide de la Tate Britain de Londres, qui détient la plus grande collection de Turner au monde.

 

             
Col du Saint-Gothard  1803-04               Bonneville en Savoie, 1803

 

Turner a conservé beaucoup d’œuvres dont il ne voulait pas se séparer [1] et qui sont, de ce fait, d’un intérêt considérable pour comprendre sa démarche. À sa mort en 1856, il a laissé un patrimoine considérable constitué d’une centaine de peintures à l’huile, des études et des ébauches, des milliers d’aquarelles, de dessins et de carnets de croquis.

 


Retour victorieux de Trafalgar 1806           La bataille de Trafalgar 1825

 

Selon l’écrivain John Ruskin, Turner avait réalisé la plupart de ces œuvres « pour son propre plaisir ». Ce legs actuellement conservé à la Tate Britain élargit considérablement les connaissances qu’on pouvait avoir sur l’œuvre de ce grand peintre romantique dont l’exposition dévoile plusieurs facettes.

 

        
Ulysse se moquant de Polyphème 1829                     Fort Vimieux 1831

 

Cet autodidacte a d’abord pris des cours de perspective et de topographie avant d’intégrer l’école de la Royal Academy à quatorze ans puis va travailler en solitaire pour s’affranchir de toute influence et trouver son propre style.

 

 
L’incendie du Parlement 1835 : 2 tableaux de cet événement dont il a été témoin

 

De sa vie il n'a cessé d'innover, expérimentant de nouveaux pigments. En fait, il annonce l’abstraction dans des tableaux mythologiques et ses esquisses. Chaque été, il partait à la recherche de nouveaux paysages qu'il dessinait et reprenait ensuite chez lui à la mauvaise saison.

 

 
Le rameau d’or 1834                              Le dernier voyage du Téméraire 1939

 

Et justement, l’exposition permet de suivre petit à petit l’évolution qu’il a suivie à travers des œuvres de jeunesse plutôt réalistes,aux tableaux plus caractéristiques de sa technique, qui ont fait son succès.
Avec en complément des aquarelles et des peintures à l’huile, on peut ainsi admirer une production qui a conservé toute sa spontanéité.

 

         
  Lumière et couleur 1843                Guerre, l’exilé et l’Arapède 1842

 

Notes et références
[1] Il a même racheté certaines de ses œuvres présentées en salle des ventes.

------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • Expo Turner © CJB  ° • 20/09/ 2020  >>
------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
25 septembre 2020 5 25 /09 /septembre /2020 04:55

Référence : Julian Barnes, L’homme en rouge, éditions Mercure de France, traduction Jean-Pierre Aoustin, septembre 2020

 

                
Le Docteur Pozzi dans son intérieur (1881), de John Sargent

 

J'avais déjà rencontré l'écrivain anglais Julian Barnes en 2018 avec Le temps du fracas, une biographie consacrée au musicien Dmitri Chostakovitch et à ses tribulations face au pouvoir soviétique sous Staline et Nikita Khrouchtchev.

Cette fois, Julian Barnes s'intéresse à un « homme en rouge », portrait que peint John Sargent en 1881 et qui a beaucoup été intrigué par cette œuvre. Il décrit avec précision sa tenue, la position des doigts et même la cordelière dont les glands « pendent juste au-dessous du bas-ventre, tel un nerf de bœuf écarlate ».

 

                   

 

Cet « homme en rouge » né à Bergerac en 1847 s’appelait Samuel Pozzi, père de Catherine Pozzi. [1] Il s'imposa rapidement à Paris comme LE médecin à la mode, surtout envers les dames de la bonne société en tant que chirurgien et gynécologue. Elles devinrent souvent ses maîtresses, dont la grande Sarah Bernhardt qui le surnomma « L’Amour médecin ».

Il est également connu pour son rôle dans la promotion de la gynécologie qui deviendra grâce à lui une spécialité médicale. Barnes le présente comme
« l’homme qui ne perdait jamais un ami... un homme sain d’esprit dans une époque démente. »

 

                   

 

Cet « homme en rouge » attire par par sa tunique écarlate qui le couvre du cou à la cheville, montrant aussi des ruchés blancs aux poignets et à la gorge. Voilà ce qui frappe d'abord dans ce tableau, mais bien sûr l'habit ne fait pas forcément le moine.

Si sa vie privée fut chaotique, la carrière du médecin fut exceptionnelle dans un temps que la postérité a surnommé "la Belle Époque" qu’on découvre à travers le regard sans concession de Julian Barnes. Une époque qu'il nous décrit comme rayonnante de plaisirs et de paix, mais aussi assombrie par une instabilité politique chronique ainsi que des crimes et des scandales à répétition. Dans ce Paris fin de siècle, on rencontre aussi des vedettes de ce temps, Sarah Bernhardt, Robert de Montesquiou, Barbey d’Aurevilly, Huysmans, entre autres.

 

               
Samuel Pozzi par Nadar

 

Julian Barnes s’intéresse également aux amis invertis de cet homme qui était pourtant un homme à femmes, comme le célèbre Robert de Montesquiou [2] qui « toute sa vie dut rivaliser avec des versions parallèles et fictives de lui-même ». C’est Samuel Pozzi qui soigna la main blessée de Montesquiou après son fameux duel contre Henri de Régnier, épisode qu’évoque Barnes dans son livre.

 

                   

 

Esprit curieux, il collectionnait les  pièces de monnaie et les statuettes, notamment les tanagras et fut en 1888 président de la Société d'anthropologie. Il s'intéressait aussi à la politique conseiller général puis sénateur de la Dordogne.
Mais sa fin fut tragique, assassiné le 13 juin 1918 par un patient soudain frappé de démence, qui tira plusieurs balles de pistolet.

Ce livre survole avec légèreté les frivolités de cette époque, même si l'on peut être dérouté par une composition faite sans ordre reposant sur une chronologie ou une thématique, décalé aussi avec ses nombreuses illustrations provenant des cartes "Félix Potin", photos de célébrités qu'on glissait alors dans les plaquettes de chocolat…

 

         

 

Notes et références
[1] On doit à Catherine Pozzi, correspondante du grand poète allemand Rainer Maria Rilke, un magnifique journal intime.
[2] Sur Robert de Montesquiou, voir ma fiche et son portrait par le peintre Giovanni Boldini --

 

Voir aussi
* Claude Vanderpooten, "Samuel Pozzi", éditions In Fine, mars 1992
* Jean-Philippe Brial Fontelive, "Les Pozzi, une famille d’exception", éditions Esprit de Pays, 2019

 

                   

-----------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • L'Homme en rouge © CJB  ° • 14/09/ 2020  >>
-----------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
18 septembre 2020 5 18 /09 /septembre /2020 14:43

Le passage de l’univers médiéval à la Renaissance a été progressif et s’est déroulé dans plusieurs directions, même si des évolutions majeures ont marqué cette période charnière entre la fin du XVème siècle et la première moitié du XVIème siècle.
 

       
                                                   Les foyers de la Renaissance
 

Au plan politique, le nouvel équilibre qui s’instaure d’abord à partir de la France et de l’Empire des Habsbourg aura des conséquences à long terme et même jusqu’à l’époque contemporaine.

La découverte progressive d’un nouveau continent, l’Amérique, outre les perspectives extraordinaires qu’elle ouvrait, réduisait l’espace européen de la planète terre et initiait une colonisation agressive dont les conséquences vont perdurer jusqu’au XXème siècle.
 

       

L’élargissement de la pensée européenne eut de profonds retentissements sur ses connaissances et ses aspirations, accélérant progrès techniques et inventions, comme dans l'important domaine de la navigation. Dans le même temps, la frustration religieuse s’est étendue, basée sur le retour à la pureté originelle du catholicisme et les dérives de la hiérarchie ecclésiastique.
 


Toulouse Renaissance Naissance de Saint-Etienne
 

L’Europe a, vers les années 1520, un appétit particulier pour une expansion territoriale d’abord dirigée vers l’Afrique, sous forme de comptoirs commerciaux puis peu à peu par une colonisation de l’intérieur des terres et de leurs ressources.

L’esclavage va se développer avec la conquête de l’Amérique.  Si les principes humanistes européens défendus par des gens comme Érasme ont essaimé au temps de la conquête, ils ont eu un impact limité, ne pouvant empêcher la destruction des civilisations amérindiennes. Un homme comme Las Casas posa en tout cas les bases de l’égalité des hommes, même s’il ne put rien contre les exactions commises contre les populations locales, mettant des siècles pour entrer dans les faits.
 

       
L'Europe de la Renaissance Pièce commémorative
 

 Dans l’Europe de François 1er et de Charles Quint, le gothique médiéval et le style flamand coexistent avec le style italien ou Renaissance qui s’imposera peu à peu, même s’il a des relents d’antique. Le gothique évolue vers un style moins rigoureux, déjà initié au siècle précédent, qu’on a appelé le gothique flamboyant, tandis que les guerres qui embrasent la péninsule italienne favorisent la diffusion du style italien.

Ce retour aux origines du christianisme, sa pureté originale,  est aussi une réaction, un rêve contre les excès de l’Église symbolisés par le système des indulgences, va paradoxalement scinder l’Europe en deux camps, pro ou anti réforme, et provoquer l’émergence du nationalisme.
 

         
          Carte du monde à la Renaissance, gravure de Gérard Mercator, 1585
 

Le monde chrétien façonné, ordonné par les siècles et miné par les progrès technologiques remettant en cause certains dogmes de l’Église, Galilée par exemple, en subira les foudres. Les tergiversations, le manque de réactions de l’Église catholique entraîne Luther de ses amis toujours plus loin dans la contestation et les contraint à réagir violemment. Cependant, nombre de pays refusent la Réforme et cette rupture aura longtemps des répercussions importantes sur la géopolitique européenne. La conquête du Nouveau monde, au-delà de l’expansion géographique et économique et d’une redistribution des cartes en Europe devrait, dans l’esprit de ses initiateurs, permettre d’édifier une nouvelle société, différente de la société européenne.
 

     
Pietro Perugino , Le Christ remettant les clés à saint Pierre, 1481,
fresque de la chapelle Sixtine, Rome.
 

Le paradoxe de cette modernité annoncée est qu’elle s’appuyait sur un retour au passé, idéalisant les débuts du christianisme. Le modernisme de la Réforme est en fait un mythe : Luther lui-même est très conservateur et raciste, la doctrine très rigoriste, la révolte radicale qui finira par mettre l’Empire à feu à sang.

Un observateur de l'époque dénonçait vers 1550 le fanatisme du calvinisme et le refus de toute négociation de la part de Calvin. Cette attitude va favoriser une prise de conscience des papistes se traduisant par une profonde réforme initiée par le Concile de Trente en 1542 et la volonté de lancer une Contre-réforme. Mais l'irréparable avait été commis, rendant vaine tout idée de réconciliation.
 

         
                                                         La danse à la Renaissance

On peut dire en tout cas que vers 1520, la chrétienté a amorcé un déclin qui s'accentuera au fil des siècles. La frustration qui en a découlé va se traduire par le besoin de se structurer dans des organisations pluri-ethniques comme pour L'Empire.

 

Cette situation débouchera aussi sur l'idée que les royautés européennes ont en commun des principes hérités du passé, qu'il faudrait reconnaître. Il en est ainsi lors des traités de Westphalie signés en 1648 de la souveraineté en matière religieuse, de la réalité de l'État-nation et de la naissance d'un embryon de droit international. C'est le tout premier départ de discussions inter-nations qui conduiront au Congrès de Vienne en 1815 ou au Congrès de Versailles en 1919, tentatives pour reconfigurer la carte du monde sur des bases plus consensuelles.
Ainsi plus de cinq siècles après la fin d'une unité européenne dirigée par la chrétienté, l'Union européenne, malgré tous ses problèmes d'intégration, représente une nouvelle tentative pour reconstituer son unité et reprendre son destin en mains.

 

       
Philippe Ariès & Georges Duby
Mammès se rend au gouverneur Césarée, 1544-1545, laine et soie, musée du Louvre

 

Voir aussi
Document utilisé pour la rédaction de l’article Guillaume Frantzwa, 1520 -- Document utilisé pour la rédaction de l’article Georges Duby, Sur les traces de nos peurs --
Document utilisé pour la rédaction de l’article  Chroniques de la paysannerie, 1453-1661 - Le vrai visage du Moyen âge -
Document utilisé pour la rédaction de l’article  Joël Blanchard, La fin du Moyen Âge --
Document utilisé pour la rédaction de l’article Jacques Le Goff, Hommes et femmes du Moyen âge --

----------------------------------------------------------
<< Ch. Broussas • Europe Renaissance © CJB  ° • 14/09/ 2020  >>
----------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
18 septembre 2020 5 18 /09 /septembre /2020 14:38

Référence : Jean et Marie-José Tulard, Les Égéries de la Révolution, éditions Robert Laffont, 360 pages, mai 2019
 

« La femme a le droit de monter à l’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la tribune. »
Olympe de Gouges (1748-1793), Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, septembre 1791
 

     
 

Jean Tulard, grand spécialiste du Premier Empire, on ne lui doit pas moins d'une quarantaine d'ouvrages consacré à l'époque napoléonienne [1], se penche ici sur la Révolution à travers le destin de ses héroïnes, qu'elles aient laissé un nom dans l'histoire comme Lucile Desmoulins ou d'autres restés quasi anonymes.
 

 
                                                                                      Germaine de Staël

Les femmes aussi, surtout sous la Terreur bien sûr, mirent leur vie en danger et furent guillotinées. Elles demandaient la reconnaissance du rôle des femmes dans la société mais apparemment, la société française n'était pas encore assez mure pour ce genre d'évolution. « Devant les menaces qui pèsent sur le pays, écrit l'auteur, elles exhortent le législateur à permettre aux femmes de s'armer, car "l'amour de la patrie en danger et la haine des tyrans leur feront aisément braver tous les dangers". Mais cela ne signifie pas que les femmes abandonneront leurs tâches d'épouses et de mères de famille… »
 

    Le club patriotique des femmes 1791


Ces égéries de la Révolution, ont eu un rôle non négligeable et même important non seulement comme symbole mais aussi en s'efforçant d'influencer les hommes politiques de leur temps – d'où le qualificatif d’« égéries » – ne pouvant le plus souvent intervenir à la tribune des assemblées ou participer à l'élaboration des décisions. Une revendication que les révolutionnaires ne cessèrent d’étouffer. Elles ont cependant réussi par exemple à ramener le roi de Versailles à Paris [2] ou à contribuer à la chute de la monarchie.
 

         
      Théroigne de Méricourt                            Manon Roland

 

Dans cette galerie de portraits, on croise Olympe de Gouges qui s'est battue pour le statut des femmes et de minorités comme les Noirs, Madame Manon Roland, Charlotte Corday qui assassina Marat et Théroigne de Méricourt. On suit le parcours de Theresia Cabarrus qui défend avec énergie les droits des femmes. C'est en prison qu'elle connaîtra Tallien, son futur mari,  participera avec lui à la chute de Robespierre qui lui vaudra le surnom de "Notre Dame de Thermidor".
 

   Lucile Desmoulins

On rencontre aussi des femmes beaucoup moins connues qui ont joué un rôle à un moment ou à un autre comme Louise-Renée Leduc (ou Reine Audu) figure des Halles, Claire Lacombe et Pauline Léon [3], qui milita pour l'égalité entre les hommes et les femmes.

 

             
Claire Lacombe                                                      Pauline Léon

Avec les Tulard, on plonge dans
l’histoire de la Révolution et on comprend mieux par exemple pourquoi le duc d’Orléans a décliné la régence après la fuite du roi [4] ou les raisons de la chute de Robespierre le 9 Thermidor an II. (27 juillet 1794) [5]
Une belle leçon sur toutes ces femmes, connues et inconnues, qui ont marqué cette époque si mouvementée de la Révolution.

 

     
        Portrait de madame Tallien » (1804), par le baron François Gérard
 

Notes et références
[1] Voir ma fiche sur sa biographie de Joseph Fouché --
[2]
Cette séquence correspond aux 5 et 6 octobre 1789 et a abouti au retour définitif de Louis XVI et de sa famille à Paris
[3] Claire Lacombe et Pauline Léon fondèrent la Société des républicaines révolutionnaires en mai 1793.
[4] Il s'agit de La fuite manquée de Louis XVI et de la famille royale, des 20 et 21 juin 1791, plus connue sous le nom de « fuite de Varennes »

[5] La chute de Robespierre s'est déroulée du 8 thermidor an II (26 juillet 1794) vers midi au 10 thermidor (28 juillet) vers deux heures du matin et mettant fin à l'époque de la Terreur. Le 9 thermidor correspond au jour de l'arrestation de Robespierre à la Convention nationale.

 

   La nuit du 9 au 10 thermidor an II

--------------------------------------------------------------------------------
<< Ch. Broussas • Tulard Égéries © CJB  ° 12/09/ 2020 >>
--------------------------------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
11 septembre 2020 5 11 /09 /septembre /2020 20:06

Référence : Nina Bouraoui, Otages, éditions Jean-Claude Latès, 170 pages, janvier 2020, Prix Anaïs Nin 2020
 

                
 

Nina Bouraoui parle dans ses romans de l'amour et du désir, l'exil et la nostalgie de son enfance algérienne, de sa quête d'identité qui lui vient de son homosexualité et de sa double culture franco-algérienne.
Son évolution est marquée dans un premier temps par un style très travaillé et des thèmes forts [1], qui fait place à un cycle d'autofiction dominé par un style plus nerveux et une narration plus centrée sur l'amour et le désir [2].

Elle renoue avec le thème de l'amour en 2014 avec Standard, histoire d'un amour tragique entre Bruno Kerjen et Marlène puis en 2016 avec Beaux Rivages qui analyse la séparation d'un couple après huit années de vie commune et avec la biographie dans Tous les hommes désirent naturellement savoir en 2018, une jeunesse écartelée entre la Bretagne natale de sa mère et l'Algérie natale de son père.

 

              
 

Le basculement d'une femme ordinaire.

Sylvie Meyer a tout subi, tout accepté jusqu’à présent dans sa vie. On pourrait dire qu’elle est sans grande défense et répugne à se battre : elle passe pour être modeste et ponctuelle, sans grande ambition, plutôt gentille, sur qui on peut compter. Rien que des qualités peu adaptées au « struggle for life », où il se combattre pour se faire une place au soleil.
 

                  
 

Âgée d’une cinquantaine d’années, elle a été abandonnée par son mari, après des années de vie commune et deux enfants. Elle n’a rien dit, tout encaissé comme si ça allait de soi, comme si seul comptait sa réputation. Puis, dans son entreprise en difficultés,  la Cagex, une entreprise de caoutchouc, où elle s’occupe de la section des ajustements, elle a tout accepté, se pliant aux volontés patronales pendant  trop longtemps,  acceptant par exemple de surveiller ses collègues, avant d’être confrontée à la mission de trop.

Mais au fond d’elle-même se sont accumulés ressentiments et haine générateurs de violence. Un jour, elle est prise d’une crise subite. C’est pour elle un révélateur et au lieu de la désespérer, ce tournant dans sa vie lui donne de nouvelles forces.
D'abord écrit pour le théâtre ce texte a été refondu pour devenir ce roman centré sur le portrait d’une femme dont les difficultés de la vie obligent à se remettre en cause et à refuser dorénavant de se soumettre.

 

             

 

Pendant trop longtemps, elle n’a pas protesté, faisant ce qu’on attendait d’elle jusqu’à ce matin de novembre où tout est remonté à la surface, où la violence des autres et l’injustice se conjuguent à sa solitude. Elle n’a alors plus de limites et une nuit, son pouvoir de destruction va se déchaîner, au-delà de toute considération de retenue ou de conséquences possibles. En tout cas, Sylvie dans ces moments-là, se sent revivre.

Le plus intéressant est sans doute ces incursions dans l’intime de Sylvie, la lente description du manque qu’elle ressent, ce subtil sentiment qui la pousse à planquer toute sa frustration au tréfonds d’elle-même jusqu’à ce que la souffrance ne soit plus supportable.
 

               
 

Commentaires et critiques
« Nina Bouraoui d’une écriture précise, finement ciselée, nous offre un texte délicat,  juste et libérateur sur les violences intérieures. »  Madame Figaro
« Nina Bouraoui signe un roman social et politique fort »  L'Express
« Nina Bouraoui signe le portrait singulier et redoutable d'une femme qui porte en elle une révolte, celle des invisibles, otages d'une vie étouffante.» Le Parisien Week-End
«  Nina Bouraoui signe un de ses plus forts livres, en phase avec notre société  »  Le Parisien
 

 
La version théâtrale avec Anne Benoît
 

Notes et références
[1] Voir par exemple La voyeuse interdite, Poing mort, Le Bal des murènes ou L'âge blessé
[2] Dans des romans comme Le jour du séisme, Garçon manqué, La Vie heureuse, Poupée Bella ou Mes mauvaises pensées, prix Renaudot 2005

Quelques fiches sur les écrivaines
* Cécile Coulon -- Muriel Barbery, Une rose seule --
* Marianne Chailland, Amélie Notomb --
* Elena Ferrante, La vie mensongère des adultes --

----------------------------------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • Bouraoui Otages © CJB  ° 26/08/ 2020 >>
----------------------------------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
9 septembre 2020 3 09 /09 /septembre /2020 22:24

        
 

« En sondant ces mots un soir d’été… » (Victor Hugo)
 

C’était hier par un soir d’été,
Le ciel comme un rideau déchiré
Rougissait dans un temps étiré
Qui n’en finissait pas, prolongé
Par la tiédeur de la soirée.
Mais que cache une telle beauté ?
 

Une joie de sentiments diffus,
Comme une petite bouffée d’air
qui nous renvoie sa part de mystère,  
Et la nostalgie de ce qui fut,
Peut-être… ou alors bien autre chose, 
Une respiration, une pose
Pour pouvoir magnifier chaque instant.
C’est sûr, je n’en demandais pas tant.
 

C’était de ces moments indicibles
Qui nous rendent parfois plus sensibles,
Si particuliers et si précieux
Que parfois nous offrent les cieux.
C’était de ces moments en instance
Où rien n’a plus vraiment d’importance,
Où quand tout est serein et tranquille,
Il semble que tout devient facile.
 

       
                                            Lilas des Indes "Soir d'été"
 

Où peut bien se cacher la beauté,
Chimère si souvent caressée
Mais si difficile à approcher,
Qu’on ne cesse jamais de traquer,
Elle est comme ces poissons fuyant
D’un seul coup, d’un simple mouvement,
Qui glissent entre les doigts, doucement
Sans aucun bruit, sans tremblement,
Comme d’évanescents souvenirs
Qu’il est vain de vouloir retenir.

 

C’était par un de ces soirs d’été
Où plus rien ne compte en vérité
Qu’un doux sentiment de plénitude
Où se noient les belles certitudes
Soumises au caprice du vent
Qui se désagrègent au fil du temps.

--------------------------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • Soir d'été © CJB  ° 09/09/ 2020  >>
--------------------------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
7 septembre 2020 1 07 /09 /septembre /2020 21:11

Référence : Jean Ver­don, La vie quo­ti­dienne au Moyen Age, éditions Per­rin, 384 pages, avril 2015
 

                  


Une syn­thèse vivante et accessible

L’objectif de cerner l’existence des individus sur une durée d’un millénaire est une tâche immense et ambitieuse. D’autant plus que les références biographiques fiables sont assez faibles sur une époque où on se préoccupait peu de la vie quotidienne du peuple et de ses conditions d'existence.

 

 

Rela­ter un quo­ti­dien qui s’étale de la fin de l’Empire romain d’Occident à la Renais­sance, soit en gros du Ve siècle à la fin du XVe, peut sembler un pari hasardeux. Les évolutions se réalisant alors sur le long terme, il n’est guère possible de comparer l’existence au temps des mérovingiens de celle à l’aube de l’année 1500 par exemple. Trop de temps sépare ces deux périodes, même si elles appartiennent toutes deux à ce qu'on a appelé le Moyen Age.

 

       

 

C’est une période en fait assez mal connue sur laquelle en plus les idées toutes faites véhiculées par les romans et les films prenant l’Histoire comme prétexte sont légion. Jean Ver­don tente avec succès de décrire comment à cette époque un individu vivait, c’est-à-dire comment en vingt-deux cha­pitres, il pouvait gran­dir, étu­dier, se marier, man­ger, boire… comment il se comportait pour satisfaire les actes essentiels de la vie courante.

 

       
                                                         L'alimentation au Moyen Age

Il faut garder à l’esprit qu’à l’époque les connaissances étaient fort limitées, on pensait que la terre était plate et qu’elle constituait le centre du monde autour duquel tournait le soleil. Le temps de vie était fort court et chacun recherchait d’abord son salut. Pour la plupart, leur horizon était limité au territoire de la commune ou guère mieux, les déplacements étaient longs et parfois aléatoires.

 

       
                   Jean Verdon  La femme en Poitou aux Xème et XIème siècle



C’était un monde de paysans soumis aux aléas de la nature, se levant avec le jour et se couchant avec le soir tombant, la notion d’heure étant variable d’un moment de la journée à un autre, d’une saison à l’autre, la notion de seconde étant inexistante. La vie était aussi conditionnée par les règles de la religion auxquelles personne n’aurait songé à déroger. La vie est alors précaire, marquée par la maladie et les accidents souvent fatals et la peur de mourir est omniprésente expliquant le poids de la religion qui structure la vie des personnes autant que la persistance des superstitions.

 

             

 

À cette époque, l’année débute à Pâques et est rythmée par les travaux des champs, plus soutenue à la belle saison, ralentie en hiver. La plupart des gens étant illettrés, la tradition orale et les images, les symboles jouent un rôle considérable. C’est par exemples le cas des retables et des fresques qui peuplent les églises où les gens du peuple peuvent suivre les récits de Saintes écritures et s’imprégner des préceptes de l’église à travers ces parcours imagés.
Dans le quotidien, ce sont d’abord les colporteurs qui propagent les nouvelles tout au long de leurs pérégrinations.

 

               
Scènes de la vie quotidienne au Moyen Age

 

La France n’est loin d’être un pays monolithique et jacobine comme elle le deviendra au temps de la monarchie absolue et surtout après la Révolution, ce n’est pas une entité que l’on peut évaluer, étudier d’un point de vue global. Chaque province a ses propres règles, ses propres mesures, que ce soit pour les unités de  poids des denrées et des objets, de distance et même pour la valeur de la monnaie. Dans ces conditions, dater un événement est toujours aléatoire et se fait souvent par référence à des repères familiaux, à des dates définies par les coutumes locales et le calendrier religieux.

 

 

Les récits sont souvent symboliques et prennent leurs distances par rapport à la réalité. Dans ces conditions, Jean Ver­don pour développer son analyse historique et nous donner une somme intéressante d’anecdotes et de faits significatifs, s’est appuyé sur des témoignages de récits du Haut Moyen Age et de textes plus conséquents sur le XVème siècle.

 

          
Par Sophie Brouquet       Jean  Verdon Être chrétien au Moyen Age

 

Voir aussi
* L'alimentation au Moyen Age --

----------------------------------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • Verdon moyen Age © CJB  ° 26/08/ 2020 >>
----------------------------------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
7 septembre 2020 1 07 /09 /septembre /2020 20:58

Référence : Yasmina Khadra, Le sel de tous les oublis, éditions Julliard, août 2020

 

           

 

L’écrivain algérien francophone Yasmina Khadra publie Le sel de tous les oublis qui raconte l’errance d’un homme et les destins brisés au lendemain de la guerre d’Algérie. On y retrouve son obsession de « reconstruire les passerelles naturelles qui existent entre l’Orient et l’Occident » à travers des destins bouleversés par les tribulations de l’histoire.

Adem est instituteur dans la région d’Alger. Comme sa femme l’a quitté, il décide de partir, de prendre la route au fil de ses envies, sans but particulier. Au cours de son voyage, Il vivra de belles rencontres, partageant croyances et rêves pour une Algérie indépendante , verra de près la misère, en fait à la recherche de lui-même, même s’il a du mal à se l’avouer.

 

              
                                               Yasmina Khadra et Boualem Sansal

 

Cette Algérie fraîchement indépendante est omniprésente dans le roman et les protagonistes répugnent à remuer un passé douloureux,  à rouvrir des blessures à peines cicatrisées et cachant des fantômes qui peuvent ressurgir sans crier gare.
Adem en fera les frais.

Effectivement, Adem est un homme blessé qui a du mal à communiquer avec les gens qu’il rencontre tout au long de ses pérégrinations. On y côtoie par exemple pêle-mêle  un ancien forçat, un nain ermite, des tenanciers de bar et de hammams, des malades au fond d’un asile, que la vie a laissé ici ou là et que chacun supporte avec ses moyens.

 

           

 

On se doute des raisons de leurs difficultés à vivre, une guerre n’est jamais innocente, mais en tout cas, elles représentent un révélateur de la réalité,  dans une situation délicate d’une après guerre où il faut inventer un avenir.
Pour l’auteur, ces vies qu’il brosse sont des exemples, des symboles des individus que chaque société a tendance à laisser sur le côté de la route. 

 

      

 

Au-delà de la démarche d’Adem, témoin de son époque, c’est bien de l’avenir de l’Algérie dont il est question. Celui d’un pays qui émerge, gérant difficilement sa complexité.  Adem a représente aussi le côté moderniste et urbain de la société algérienne, plutôt rationnel que religieux, en bute aux traditionalistes. On se trouve face à une société de rupture prônant l’éducation des jeunes et l’émancipation des femmes.

Khadra pense que seul un amour partagé peut sauver ceux qui parviennent à s'accepter. « La vie est un navire qui ne possède pas de marche arrière. Si on n'a pas fait le plein d’amour, c’est la cale sèche garantie au port des soupirs. Lorsqu’on échoue là où les voiles sont en berne, on s’en veut amèrement de n’avoir pas laissé grand chose pour ses vieux jours. »

 


Yasmina Khadra, Frédérique Deghelt et Éric Orsenna

 

Voir mes fichiers sur l'auteur
* Le sel de tous les oublis -- Les hirondelles de Kaboul --
*
L'Olympe des infortunes -- L'outrage fait à Sarah Ikker --

-----------------------------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • Khadre Oublis © CJB  ° 26/08/ 2020 >>
-----------------------------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0
7 septembre 2020 1 07 /09 /septembre /2020 20:51

         
Cécile Coulon en 2018 et 2017

 

La jeune auteure auvergnate apparaît d'abord comme très précoce. Dès ses 16 ans, elle publie son premier roman "Le Voleur de vie", aux éditions Revoir puis très vite reçoit le prix Mauvais genres puis le Prix de la ville de Rivesaltes. Dans le même temps, en 2016 elle prépare une thèse sur Le Sport et le corps dans la littérature française contemporaine. L'année suivante paraît Trois saisons d'orage qui obtient le prix des libraires.

Délaissant pour un temps le roman, elle publie un recueil de poésie Les Ronces qui obtient le prix Guillaume-Apollinaire et le prix de "La Révélation de la poésie de la Société des gens de lettres". Se tournant vers le théâtre, elle co écrit une courte pièce "On se remet de tout". Tout récemment en 2019, elle obtient le prix littéraire du Monde avec Une bête au paradis, roman qui dépeint la vie d'une orpheline recueillie par sa grand-mère paysanne.

 

                 

 

Cécile Coulon campe des personnages forts, auxquels la vie fait rarement des cadeaux. Dans "Le cœur du pélican", Anthime, alias le Pélican, va connaître la fragilité de la gloire du sportif et la souffrance que ça implique. Un destin tout à la fois simple et extraordinaire d'un homme qui va chercher à rebondir après son échec.

Le rire du grand blessé, C’est plutôt Défense et illustration de la littérature, dans la droite ligne de George Orwell, d'Aldous Huxley ou de Ray Bradbury.
Au départ, rien ne disposait le susnommé 1075 à s’intéresser à la littérature. Au contraire, il faisait partie des analphabètes dans un pays où seules sont autorisées des lectures publiques encadrées qui instrumentalisent le livre et la lecture.
Mais il va vivre une rencontre improbable avec une enseignante. C’est ainsi que naît le désir et le besoin de comprendre qui le conduisent à une remise en cause radicale.

 

           
 


Dans "Une bête au paradis", on retrouve le thème de l'opposition entre la ville et la campagne, qu'elle affectionne. Le paradis, c'est une ferme isolée au bout de nulle part où vit Blanche avec sa grand-mère. Elle rencontre l'amour avec Alexandre mais quand celui-ci par ambition veut rejoindre la ville, elle refusera de le suivre.

 

        

 

À propos de ce roman, Cécile Coulon dit dans une interview : « Je construis mon intrigue en pensant à un lieu. J’essaie de faire en sorte qu’il devienne un personnage à part entière. Dans ce roman, j’ai planté le décor et on n’en sortira jamais. Le principe du paradis est qu’il n’y a pas de porte de sortie. Ici aussi on aurait pu dire : "Bienvenue. Abandonnez tout espoir, vous qui entrez ici ». On ne peut pas sortir de cette ferme ».

 

Dans "Les grandes villes n'existent pas", Cécile Coulon dit qu'elle a souvent entendu cette remarque dans sa jeunesse : « Quelle horreur d’être jeune dans ce coin ! ». Un coin de terres agricoles loin des banlieues dortoirs. Le village, c'est d'abord le stade, l’école, l’unique boutique et l’église où Cécile a grandi heureuse en ignorant tout de la grande ville.


D'où ce thème majeur dans ses romans. Elle disait d'ailleurs début 2020 dans une interview au Monde : Cécile Coulon, écrivaine : « Je tords le cou à l’idée qu’il faudrait quitter son lieu de naissance pour réussir. »

 

        

 

Œuvres principales
* Le voleur de vie, éditions Revoir, 2007
* Le roi n'a pas sommeil, éditions Viviane Hamy, 2012
* Trois saisons d'orage, éditions Viviane Hamy, collection Littérature française contemporaine, 2017
* Une bête au paradis, éditions de l'Iconoclaste, 2019, prix littéraire du Monde

-----------------------------------------------------------------------------
<< Christian Broussas • Cécile Coulon © CJB  ° 25/08/ 2020 >>
-----------------------------------------------------------------------------

Partager cet article
Repost0